Faire des images d’action en montagne, quelle que soit la saison, implique de suivre quelques règles. Néanmoins, suivre ces impératifs, le plus souvent techniques, ne permettra jamais de remplacer l’essentiel : l’émotion d’un instant qui se saisit… ou pas ! « Être un athlète soi-même apparaît une des conditions sine qua non pour espérer devenir photographe outdoor ».
Un moment suspendu
« À cet instant très précis, je sens au plus profond de moi que le truc peut être dément… Il est 15h, un après-midi de printemps. 1700 m d’altitude, dans la Mer de Glace. C’est un jour blanc, sans contraste lumineux. Tu entends résonner le silence. On perçoit les pulsations de la montagne. De petits craquements : le glacier vit. Mon coeur palpite. L’effort physique un peu, l’excitation surtout. Se calmer. L’arche de glace est là. Mon pote Léo Slemett également. Avec cette prestance naturelle qui caractérise les athlètes de haut niveau. Ce moment ne s’est jamais produit. Il ne se produira plus jamais. Vite ! Je plante mon bâton. D’un seul mouvement, je décroche l’appareil photo de la bretelle de mon sac à dos, l’allume et le porte à mon oeil droit. Une demi-seconde. Ce qu’on appelle le tournemain. Façon Lucky-Luke. Deux clichés en grand-angle. Je joue la sécurité. Puis la mise au point. Facile, intuitive. Léo n’a pas encore bougé. Et là, à l’instant précis où je clique sur la gâchette, une certitude, celle que je ressens parfois : là, il se passe quelque chose ! Une bouffée d’adrénaline. Une émotion. Ma passion. Mon métier ! »
La vision du photographe
Des souvenirs de la sorte, Mathis pourrait en raconter pendant des soirées entières, au refuge ou ailleurs. Et pour cause : contrairement à la photo statique (qui connaît ses propres contraintes), l’image d’action en extérieur et plus particulièrement en montagne, ne se contrôle pas à 100%. Il faut savoir jouer avec une multitude de paramètres dont certains s’avèrent bien difficiles à maîtriser, comme les caprices de la météo ou la qualité de la neige changeante pour ne pas en dire davantage, et donc, dépendre d’une forme d’incertitude qui fait qu’à l’instant t, tout se conjugue pour donner une image unique et singulière.
Cette magie se mérite. On n’a rien sans rien. Si l’on n’est pas capable d’être à la bonne heure au bon endroit, pas besoin d’espérer qu’un petit nuage va filtrer le soleil, adoucir les contrastes tout en sublimant le geste sportif (ou le paysage)… Être un athlète soi-même apparaît une des conditions sine qua non pour espérer devenir photographe outdoor car il ne faut pas ralentir le groupe mais aussi être capable de se déplacer en autonomie dans ces endroits périlleux, tout en étant alourdi par le matériel de prise de vue. Skier ou grimper avec un sac à dos lesté d’au moins 5 kilos supplémentaires, c’est déjà un réel handicap… D’ailleurs, le kit idéal de Mathis Dumas pèse justement 5 kilos : « Je pars avec deux boitiers, chacun doté d’un objectif différent, l’un avec un grand-angle, l’autre avec un zoom ; des batteries de rechange ; deux GoPro ; et, si je dois filmer, un stabilisateur ainsi qu’un drone. « .
La mobilité devient une arme en milieu hostile : pour le coup, le trop est vraiment l’ennemi du bien ! Cette épure en termes de matériel ne vaut que pour les appareils photo évidemment, pas le matériel technique qui dépend du milieu visité. Au final, le photographe peut se retrouver lesté de manière significative, même en ayant été d’une grande vigilance.
Quelques Conseils
- En milieu humide ou par grand froid, la buée est l’ennemie du photographe. Il s’agit alors d’éviter à tout prix les changements brusques de température et d’avoir un tissu doux en microfibre afin de nettoyer régulièrement l’objectif.
- Bien connaître son matériel : ce n’est pas au milieu d’un endroit improbable que l’on va tester pour la première fois un boîtier ou quelconque accessoire !
- Avoir son matériel accessible et toujours rangé de la même manière.
- Se méfier de la lumière. En haute-montagne ou sur la neige, la réverbération et les UV influent beaucoup sur l’image qui se « bouche », c’est à dire que le noir ou le bleu foncé prédominent. Si l’ère du numérique a hautement facilité la gestion de la lumière, « ne pas enterrer une image » demeure une préoccupation de chaque instant. Préférez toujours les lumières du matin ou du soir, voire les ambiances joliment contrastées d’un ciel nuageux, plutôt que le soleil implacable du début d’après-midi.
- Ne shootez pas pour shooter : ce n’est pas en remplissant une carte mémoire que vous aurez une belle image, mais en vous concentrant sur votre cadrage. Prenez le temps d’essayer plusieurs options avant de donner le « Go ! » à vos modèles. C’est bête à dire, mais si ce n’est pas beau dans l’objectif, il n’y a aucune chance que ça le soit au final ! Mieux vaut donc faire moins d’images mais en optimisant les prises de vues.
Retrouvez toute l’actualité et les conseils des membres de la Rebloch’Team sur le blog Snowleader !