« La marche fait intervenir 80 à 90% des muscles du corps » (Dr Patrick Bacquaert ). Vous comprendrez assez facilement avec ce chiffre que l’on ne peut pas se limiter à l’entraînement des muscles cardio-respiratoires pour se donner toutes les chances de réussir un parcours comme celui du GR20.
Préparation physique et marche/course en montagne
Qui plus est, si nous avions besoin de pousser notre démonstration plus loin, les analyses comparant la marche en montagne et la marche citadine (ou le trail et la simple course sur route), montrent que les activités pratiquées sur des parcours accidentés obligent un engagement et des sollicitations musculaires beaucoup plus grandes.
Découvrez les conseils de Snowleader pour vous préparer physiquement au GR20 :
La place de la préparation physique dans l’entraînement
L’accumulation des montées/descentes, le port du sac à dos, l’utilisation des bâtons, le passage sur des parties techniques où il convient de s’accrocher, de tirer, de garder l’équilibre engendrent une grande fatigue du système périphérique : le système musculo-squelettique (mais aussi les tendons et ligaments) est soumis à rude épreuve.
Pour toutes ces raisons, le renforcement musculaire n’est pas qu’un simple complément d’entraînement, mais un incontournable qui vous permettra de braver toutes les difficultés avec plus d’aisance.
Pour aller plus loin et bien comprendre :
Ceux et celles qui ont une petite expérience sur des « longues » ballades en montagne se sont sûrement vite rendus compte que le premier facteur physique qui devient limitant dans ce genre de pratique est la capacité des muscles à répéter les contractions (ou à résister aux tensions) et non pas la capacité du coeur à suivre les demandes. Pour faire simple, on a plus souvent mal aux jambes que l’on est essoufflé.
Les montées entraînent une augmentation de la production de force qui croie avec la pente (au delà de +15% de pente, les études montrent une élimination de la production de force par restitution de l’énergie élastique. En clair, la production de force ne se fait plus que par une contraction concentrique des muscles).
Les descentes engendrent des contractions excentriques qui sont rapidement inflammatoires suite à la destruction du squelette protéique cellulaire (fibre musculaire).
Source image : http://transformationphysique.blogspot.com/
Si l’utilisation des bâtons soulage le travail des membres inférieurs, elle implique des contractions des membres supérieurs et des muscles du tronc. Un renforcement de cette partie du corps est donc primordial pour en faire un atout.
Bien comprendre les contractions musculaires
Concentration Excentrique | Concentration Concentrique | Concentration isométrique | |
Comment ? | Le muscle se contracte mais produit une force inférieure à la sollicitation extérieure | Le muscle se contracte et produit une force supérieure à la sollicitation extérieure | Le muscle se contracte et produit une force égale à la sollicitation extérieur |
Qu’est ce qui se passe ? | Le muscle s’allonge | La muscle se raccourcit | Le muscle est immobile |
Quand ? | En descente par exemple | En montée par exemple | Dans très peu de mouvements sportifs spécifiques |
Production de force ? | Très grande production de force | Petite à très grande production de force | Petite à très grande production de force |
Traumatisme ? | Très traumatisant pour la fibre musculaire. | – | – |
Bien s’y prendre pour se renforcer qualitativement
Maintenant que l’on a compris que se renforcer est une étape plus que recommandée, il faut définir quoi faire et comment le faire. Pour répondre à cette question, il est intéressant de regarder la traumatologie de la discipline. Quelles sont les blessures les plus fréquentes (ou quelles sont les parties du corps les plus touchées par les blessures). Un corps blessé est un corps qui ne peut pas s’entraîner, et donc qui régresse.
Le premier objectif du renforcement va donc être de limiter (voir éradiquer) toutes les blessures résultantes de l’entraînement : « d’abord ne pas nuire » (Benjamin Del Moral). Et cela dans le but de se donner toutes les chances de progresser en poursuivant un entraînement régulier.
Bien-sûr, tout ce que nous dirons sur la traumatologie est très général. Chaque coureur, en fonction de sa morphologie, de sa façon de courir, de ses antécédents, de sa fatigue du moment devra prendre en considération sa propre expérience pour en déduire ses besoins individuels et spécifiques.
Source image : www.lepape-info.com
Notre expérience nous pousse à être vigilant sur les différents types de traumatologie de la cheville, et sur le syndrome de l’essuie-glace (tenseur du farci latta) qui est de plus en plus répandu chez le coureur.
Nous en déduisons les pistes de travail suivantes pour le marcheur et le coureur : – Travail +++ sur le gainage du rachis (muscles entourant la colonne vertébrale) – Renforcement des quadriceps (principalement en concentrique, mais peut avoir une utilité de le faire en excentrique) – Renforcement des ischios jambiers (principalement en excentrique) – Renforcement des muscles du mollet (en concentrique et en excentrique) – Renforcement des muscles de la ceinture pelvienne (hanche) – Renforcement des membres supérieurs. |
Avant de se lancer, il est important de s’imaginer le corps comme un ensemble de chaînes où tout est relié. Si un maillon de la chaîne est faible, c’est toute la chaîne qui s’affaiblie et risque de se casser (= la blessure). Le corps est naturellement fait pour bouger, pour se mouvoir alors ne nous en privons pas.
Néanmoins les qualités de mouvement naturelles chez l’enfant se détériorent en grandissant par manque d’entretien. Il est donc important de travailler progressivement mais sans se fixer de limite. Si votre seule limite est celle que vous vous fixez, vous arriverez avec le temps et l’assiduité dans le travail à des résultats époustouflants.
Dans ce sens, privilégiez les mouvements fonctionnels, poly-articulaires (squats, fentes, montées sur banc..) en y mettant le plus d’amplitude possible (dans la limite de vos mobilités articulaires : qui grandiront avec l’entraînement). Ces mouvements nécessitent une technique d’exécution plus précise que les mouvements mono-articulaires mais sont plus complets et permettent bien souvent de travailler plusieurs cibles en même temps.
Photo : Guillaume Peretti l’ancien recordman du GR20 et Romain Hurtault le préparateur physique de l’équipe de France de ski Freestyle
Quelques remarques en plus :
– Le renforcement musculaire doit se faire de façon qualitative. Mettez l’accent sur votre technique, votre respiration et mettez dans vos mouvements tout l’investissement (= l’intensité) que vous pouvez fournir. Un renforcement (ou un mouvement) mal effectué peut être improductif (voir contre-productif, ou dangereux pour votre intégrité physique).
– Là encore, la variété des exercices sera votre meilleur allié pour une bonne progression.
– Vous noterez que nous n’avons parlé que de « renforcement musculaire » et pas de « musculation ». Ces deux mots sont très proches, mais la musculation est plus souvent relatée à du travail sur machine ou avec des charges. Ce type de travail n’est pas du tout proscrit, bien au contraire. Les grandes sollicitations musculaires qu’il provoque sont souvent plus importantes que le travail à poids de corps et rend ce travail beaucoup plus qualitatif.
Néanmoins : ATTENTION : pratiquez la « musculation » accompagné d’un professionnel qui vous aiguillera sur les postures, les conduites à tenir dans vos séances pour continuer de pratiquer « en toute sécurité ».
Et le gainage dans tout ça
Le gainage se définit par la capacité à maintenir une certaine rigidité articulaire tout en permettant un mouvement sécurisé (Didier Reiss). « Gainage » vient du mot « gaine ». En renforçant les muscles qui entourent une articulation ils agiront comme une gaine.
Bien souvent, on entend parler de gainage pour les muscles qui entourent la colonne vertébrale, qui sont responsables du gainage du rachis (ceinture abdominale + ceinture Lombaire) mais le terme gainage peut être étendu aux autres articulations.
Romain Hurtault, préparateur physique de l’équipe de France de Ski Freestyle
Quel interêt pour la marche ou la course à pied ?
Le gainage « Lombo-abdominal » permet le transfert des forces des membres inférieurs aux membres supérieurs (cf. image). Il permet également de maintenir une position stable et équilibrée en l’air entre deux appuis et enfin il permet de maintenir les courbures naturelles de la colonne vertébrale.
Cette simple définition nous permet de comprendre l’importance du gainage dans n’importe quelle discipline sportive mais également dans la vie de tous les jours. Sans gainage, l’homme est très limité dans ce qu’il peut produire en terme de mouvement.
Souvent, le gainage est associé à une position statique, immobile. Si « l’isométrie » est une solution simple pour apprendre et débuter, il ne faut pas considérer ça comme une fin en soit et se limiter à ça pour chercher une progression ou des sollicitations musculaires plus importantes. De plus, dans la pratique sportive les mouvements purement isométriques sont rares.
Il faut donc travailler le gainage dynamique (gainage de mouvement et d’apesanteur selon Didier Reiss) soit en proposant des situations sur surfaces instables soit en créant une instabilité par le mouvement, en bougeant les bras et les jambes par exemple, pour obliger le tronc à réadapter sa posture à chaque instant.
Organiser ses séances de renforcement musculaire
Renforcement Musculaire | Gainage | |
Combien de fois par semaine ? | 1 à 3 fois par semaine | 2 à 7 fois par semaine |
Où les placer dans la semaine ? |
– Dans un jour off d’entraînement spécifique. – Le même jour qu’un entraînement spécifique, de préférence après cet entraînement et espacé de 6h. | – N’importe quand |
Comment s’échauffer ? | – Préférez le travail spécifique, échauffez vous sur les mouvements que vous allez réaliser pendant votre séance. Monter progressivement en intensité. | – Idem, en réalisant des exercices de plus en plus difficile. |
Renforcement musculaire | Gainage | |
Combien d’exercice(s) par groupe musculaire |
– Dans un premier temps, alterner le groupes musculaires au sein de la même séance – Puis, avec le temps et votre progression, vous réduirez le nombre de groupes musculaires travaillés dans la même séance jusqu’à vous contrer sur un seul groupe musculaire par séance |
– Soit on travaille exercice par exercice – On peut aussi enchaîner 2,3, 4 voir 5 exercices dans la même série. Attention toute fois à garder suffisamment de lucidité pour conserver une qualité de placement irréprochable. |
Construire ses séances de renforcement musculaire
Renforcement Musculaire | Gainage | |
Combien de répétition(s) par exercice ? |
– 6 à 15. Au delà de 15 si l’exercice est trop simple se référer à la partie « Comment augmenter la difficulté d’un exercice » |
– 30s à 2’ / Ou 10 à 20 répétitions. Au delà si l’exercice est trop simple se référer à la partie « Comment augmenter la difficulté d’un exercice simple » |
Combien de série(s) par exercice ? | – 3 à 6 séries par exercice | – 3 à 6 séries par exercice |
Combien d’exercice(s) par série ? |
– Dans un premier temps : 1 exercice par série – Puis, avec l’entraînement vous pourrez enchaîner les exercices soit en alternant les groupes musculaires sollicités, soit travaillant sur le même groupe musculaire (difficulté +++) – Dans le cas d’un enchainement d’exercice : mettez les exercices les plus difficiles techniquement au début de la série. |
– Dans un premier temps : 1 exercice par série – Puis, avec l’entraînement vous pourrez enchaîner les exercices soit en alternant les groupes musculaires sollicités, soit travaillant sur le même groupe musculaire (difficulté +++) – Dans le cas d’un enchainement d’exercice : mettez les exercices qui vous demandent le plus d’attention dans leur réalisation au début de la série. |
Combien de récupération entre les séries ? | – 1 à 2 minutes | – 30s à 1 min max |
Comment augmenter la difficulté d’un exercice simple ? |
– Augmentez le nombre de répétitions ou séries. – Jouez sur les « tempos » (mettre des temps de pause pendant les reps, augmenter les temps sous tension en augmentant les phases excentriques, concentriques ou isométriques) – Cumulez les exercices dans la même série |
– Augmentez le temps de travail ou le nombre de répétitions – Travaillez sur des surfaces instables (coussin, sable..) – Diminuez la surface d’appui au sol – Mettez des contraintes extérieures (un partenaire qui pousse..) |